Mais quel rapport avec le dysfonctionnement d'un programme ?
Il faut pour cela remonter aux temps préhistoriques de l'informatique, à une époque où le prototype dernier cri des ordinateurs s'appelait Mark 1, énorme machine de 5 tonnes mesurant 15 mètres de long et 2 mètres 50 de hauteur.
Dans un cliquetis digne des "Temps Modernes", le monstre vorace ingurgitait des kilomètres de bandes préalablement perforées par les programmeurs suants sur des téléscripteurs.
En récompense, la bête additionnait deux nombres de 23 chiffres en 3 dixièmes de secondes : Les plus grands mathématiciens de l'époque qui l'entouraient étaient heureux, les experts en balistique aussi…
Lorsqu'une soirée de l'été 1945, le tintamarre des rouages s'arrêta net.
La crème des savants se précipita au chevet du dinosaure aphasique, scrutant les entrailles de câbles du géant.
Au cours des longues heures d'auscultation infructueuse qui suivirent, le Mark 1 toujours muet refroidissait lentement lorsque soudain, Grace Murray Hopper, brillante mathématicienne et pionnière de la programmation, dégaina promptement la pince à épiler qui ne la quittait jamais pour extraire délicatement d'un relais électromécanique une mite aux ailes à moitié grillées…
Ci-contre : fac-similé du "bug", tel qu'il a été consigné dans le livre de bord du Mark 1, le 9 septembre.
Nos académiciens ont depuis francisé le terme bug qui est devenu "bogue"…
mais a-t-on jamais vu une châtaigne bloquer un ordinateur ?
Les puristes objecteront que les termes "bug" et "debug" étaient employés bien avant cette mite, à l'époque héroïque du télégraphe et des premiers appareils électriques et qu'on en trouve même une définition "moderne" dans un dictionnaire de la fin du XIXème siècle. Il n'en reste pas moins que l'anecdote comtée ici est bien plus poétique et chargée de symbole…